René JOLY - Chimène
L'un des grands inconnus de la pop française, devenu l'un de ses grands oubliés. On sait bien peu de choses de René Joly. Natif du nord de
Chimène (1970) Chimène / Château de craie / L'amour fut doux / Princesse / Les yeux d'Elia / L'amour vivant / Sombre fortune / L'or / Le parfum d'un fleur
À la première écoute, l’auditeur ne peut qu’être dérouté, tant cet album se situe en marge de la production française. Dire que le disque est original est un euphémisme. C'est en effet, une expérience sans équivalent laissant l’impression tenace d’être entre présence tout à la fois d’un album musicalement trop daté et comme situé hors du temps.
Le disque opère une distanciation subtile en même temps qu’il est doué d’un pouvoir d’envoûtement grâce à cette voix de tête si particulière, cette façon de chanter qui n’appartient qu’à lui. Et puis surtout, il y a ces compositions étonnantes aux climats si étranges qui tiennent tout à la fois de la féerie (« Le château de craie ») et du mauvais rêve (« Le parfum d’une fleur »). Les arrangements originaux et somptueux tout en délicatesse, se refusent aux effets faciles et au clinquant. Les paroles sont à la mesure de l’écrin sonore façonné par Manset, subtiles et entêtantes souvent oniriques, comme exhumées du fond des âges. Ce disque de Joly à la couleur bien particulière est un joyau aux subtiles nuances, porté par une voix aisément reconnaissable même lorsqu’elle est maquillée sur « Chimène » d’un flanger du meilleur effet. Ce titre sera d'ailleurs le seul tube de l’album et le premier morceau à utiliser la technique du phasing née des expérimentations de Bernard Estardy (ingénieur du son) et Gérard Manset. Joly nous transporte dans son univers oniriques, ses climats d’automnes mordorés, ses paysages peuplés de princesse (« Princesse ») de châteaux enfouis au fond des forêts (« Château de craie »), de jeunes femmes évanescentes et mystérieuse (« Les yeux d’Elia »), évoquant des souvenirs amers d’amours perdus (« L’amour fut doux », « L’amour vivant »), de destinée fatale (« Sombre fortune ») et d’amitiés gâchées (« L’or »), le tout soutenu par des orchestrations aériennes où les violons omniprésents s’entremêlent au piano, aux flûtes et aux guitares acoustiques créant une atmosphère unique et inoubliable. Difficile de ne pas succomber aux effluves ensorceleuses de ce disque sans équivalent.