Mallarmé - Brise marine

Publié le par Athalide

Brise marine

La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.

Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres

D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !

Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux

Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe,

Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe

Sur le vide papier que la blancheur défend

Et ni la jeune femme allaitant son enfant.

Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,

Lève l’ancre pour une exotique nature !

Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,

Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !

Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,

Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages

Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots.

Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots!


Stéphane Mallarmé (1842-1898), Poésies, 1899

Publié dans Citation du jour

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A
ps: Mallarmé sans e... je persiste dans ma relecture, pardon
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A
merci pour m'avoir fait découvrir ce superbe poème de Mallarmée en entier... Je n'en connaissais que le début (comme bcp) mais je lis avec jubilation que depuis toujours je "lisais" faux : "la chair est triste et lasse" , était ma version à moi ;-)
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